L’indemnisation du déficit fonctionnel temporaire

Le déficit fonctionnel temporaire a été défini dans le rapport DINTILHAC. Cette définition est fidèlement reprise par la Cour de cassation. Pourtant, la pratique de l’évaluation par classes du déficit fonctionnel temporaire initiée par l’AREDOC nuit à l’indemnisation intégrale du préjudice de la victime.

La définition du déficit fonctionnel temporaire

Le déficit fonctionnel temporaire a été défini dans le rapport DINTILHAC, repris par la Cour de cassation.

Le déficit fonctionnel temporaire dans la nomenclature DINTILHAC

Le déficit fonctionnel temporaire est défini par la nomenclature DINTILHAC :

« Ce poste de préjudice cherche à indemniser l’invalidité subie par la victime dans sa sphère personnelle pendant la maladie traumatique, c’est-à-dire jusqu’à sa consolidation.

Cette invalidité par nature temporaire est dégagée de toute incidence sur la rémunération professionnelle de la victime, laquelle est d’ailleurs déjà réparée au titre du poste « perte de gains professionnels actuels ».

A l’inverse, elle va traduire l’incapacité fonctionnelle totale ou partielle que va subir la victime jusqu’à sa consolidation. Elle correspond aux périodes d’hospitalisation de la victime, mais aussi à la perte de qualité de vie et à celle des joies usuelles de la vie courante que rencontre la victime pendant la maladie traumatique (séparation de la victime de son environnement familial et amical durant les hospitalisations, privation temporaire des activités privées ou des agréments auxquels se livre habituellement ou spécifiquement la victime, préjudice sexuel pendant la maladie traumatique, etc). »

 

Le déficit fonctionnel temporaire par la Cour de cassation

La Cour de cassation adopte une conception du déficit fonctionnel temporaire très fidèle à celle de la nomenclature DINTIHLAC, retenant que le poste de déficit fonctionnel temporaire répare la perte de la qualité de vie de la victime et des joies usuelles de la vie courante pendant la maladie traumatique et intègre le préjudice sexuel subi pendant cette période ainsi que le préjudice d’agrément (Cass. Civ. 2ème 11 décembre 2014 ; Cass. Civ. 2ème 25 avril 2024)

 Le préjudice sexuel avant consolidation et le préjudice d’agrément avant consolidation ne sont donc pas autonomes en l’état actuel de la jurisprudence.

L’évaluation du déficit fonctionnel temporaire

Traditionnellement, l’évaluation du déficit fonctionnel temporaire s’effectue en retenant par période, un taux de déficit fonctionnel, avant la consolidation.

Par exemple, il est constant qu’en période d’hospitalisation, le déficit fonctionnel temporaire est total, la victime étant privée de toutes les joies usuelles de la vie courante.

Le principe d’intégration de toutes les composantes

Le taux de déficit est fixé en fonction des déficiences de la personne, de la perte des joies usuelles de la vie courante, des contraintes liées à une immobilisation (atèle, plâtre, béquilles, fauteuil roulant) et à l’intensité des soins (séances de rééducation, kinésithérapies, consultations).

L’évaluation doit aussi tenir compte de l’impossibilité ou des restrictions pour la victime de s’adonner à ses activités sportives et de loisir avant consolidation ainsi qu’à ses activités sexuelles.

C’est en tenant compte de l’ensemble de ces composantes que le taux de déficit fonctionnel temporaire devrait, par période, être évalué.

La pratique n’est cependant pas tout à fait satisfaisante.

Le péril de l’évaluation par classes du déficit fonctionnel temporaire

L’AREDOC se définit sur son site internet comme suit :

« L'Association pour l'étude de la Réparation du Dommage Corporel est un organisme professionnel au sein duquel est organisée la réflexion sur les divers problèmes que posent l'évaluation et la réparation du dommage corporel, quel qu'en soit le contexte. Cet organisme réunit assureurs, réassureurs et médecins experts intéressés par ces réflexions. »

Elle forme un grand nombre de médecins conseil et exerce une réelle influence sur les modalités d’évaluation des préjudices des victimes.

Concernant l’évaluation du déficit fonctionnel temporaire, l’AREDOC a mis en place un système de classes dans les gênes temporaires vécues par la victime avant la consolidation.

Si la victime n’est pas en période de gêne temporaire totale (notamment en cas d’hospitalisation), elle sera classée dans l’une des quatre autres classes (Classes IV – III- II – I).

Il est précisé le système de concordance suivant :

-        Classe IV :                  Déficit fonctionnel temporaire de l’ordre de 75%

-        Classe III :                  Déficit fonctionnel temporaire de l’ordre de 50%

-        Classe II :                   Déficit fonctionnel temporaire de l’ordre de 25%

-        Classe I :                    Déficit fonctionnel temporaire de l’ordre de 10%

 

Cette classification est en contradiction avec le principe de réparation intégrale du préjudice.

En effet, à l’heure de l’indemnisation du déficit fonctionnel temporaire, la victime sera indemnisée à hauteur de 75%, 50%, 25% ou 10% de déficit fonctionnel temporaire, quand bien même elle aurait été évaluée à 85%, 60%, 30% ou 15% si le système de classes n’avait pas été appliqué.

 

L’évaluation par classe manque donc de précision.

Surtout, le classement ne tient pas compte du préjudice d’agrément pré-consolidation et du préjudice sexuel vécu pendant la maladie traumatique.

A titre d’illustration, la victime sera classée en Classe II, d'après l'AREDOC, si elle présente :

 

·       « Contention de soutien d’un membre supérieur avec préhension déficitaire

·       Locomotion possible avec une canne

·       Immobilisation par collier cervical rigide ou ceinture de maintien lombaire

·       Douleurs thoraciques avec dyspnée d’effort (un étage) et nécessité de rééducation respiratoire

·       Vertiges paroxystiques bénins pendant la phase aiguë

·        Désordres neuropsychologiques avec difficultés de mémorisation, phobies, conduites d’évitement justifiant un suivi médical régulier par spécialiste. »

 

Si la victime est par ailleurs une cavalière chevronnée et privée de son activité sportive pendant cette période, elle entrera néanmoins dans la classe II.

 

Le préjudice d’agrément pré-consolidation ne sera donc pas indemnisé.

Conclusion

L’évaluation et l’indemnisation du déficit fonctionnel temporaire nécessitent d’être accompagnés par un médecin conseil de victime et un Avocat spécialiste du droit du dommage corporel qui sauront défendre vos intérêts.

Une évolution de la jurisprudence de la Cour de cassation rendant autonome le préjudice d’agrément pré-consolidation et le préjudice sexuel temporaire est souhaitable, dans le respect du principe de réparation intégrale du préjudice de la victime sans perte ni profit.

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